Dans la région du Tōhoku (東北地方, Tōhoku-chihō).dans le nord de Honshū, célèbre pour ses sources chaudes, les poupées kokeshis, mignonnes et épurées, étaient fabriquées par les artisans du bois depuis la fin de l’ère d’Edo, il y a environ 150 ans.
Destinées aux enfants des paysans, simples et rustiques mais élégantes et fines comme sait en créer l’esprit japonais, les poupées étaient peintes et décorées de fleurs et recouvertes de laques. Ouvragées en bois sec de cerisier, poirier, cornus ou érable, le bois devait vieillir de un à cinq an avant de pouvoir être travaillé. Il existe plus d’une centaine de types de ces poupées. (Les poupées au Japon sont nombreuses et il en existe de bien d’autre sortes )
Sorte de petits fétiches, corps surmonté d’une tête, elles ont l’aspect d’un petit homme ou femme japonaise, elles ne sont pas abstraites mis renvoient à un personnage. Le tout habilement décoré témoignant d’un sens émouvant du dessin . On croirait voir quelque petit personnages de bande dessinées. Les poupées ne sont pas que des jouets pour les enfants elles témoignent en fait de l’amour des parents pour leurs enfants, elles sont une fascination de l’enfance, hommage à la naïveté qui nous les rends si proches.
Réalisés avec tendresse et affection, elles nous sont si proche et émouvantes, est-ce parce qu’elles ont une âme ? ou qu’elles sont des sortes d’offrande pour que les enfants demeurent en bonne santé, d’où cet aspect de fétiche ou de porte bonheur et ont gardés cette signification quand on les offre aujourd’hui pour déclarer son amitié ou son amour à la personne qui la reçoit. Symbole positif s’il en est et emblématique de la valeur de l’enfant dans la famille japonaise pour qui tout est donné pour en faire un bel adulte. (L’éducation est un véritable sacerdoce pour la femme japonaise qui y met une énergie incroyable.
L’origine lointaine et rituelle de la poupée kokeshi ainsi que son importance au Japon vient peut être de son origine sacrificielle telle que le rapporte l’écrivain Yoko Tawada dans “Narrateur sans âmes, – Là où commence l’Europe” :
« Il y a bien longtemps, lorsque les gens de son village vivaient encore dans une très grande misère, il pouvait arriver que les femmes tuent leurs propres enfants, juste après la naissance, pour ne pas les condamner à mourir de faim. Pour chaque enfant ainsi tué, on fabriquait une kokeshi, ce qui veut dire ‘faire disparaître l’enfant’, afin que les gens n’oublient jamais que c’est grâce au sacrifice de ces enfants qu’ils avaient survécu. »
Mais si la vie conserve son coté dur et implacable, lutte sans merci pour la survie, la magie et l’émerveillement aussi demeure. Les poupées kokeshis ont leur survivance dans les “Kimmidolls” qui revisitent la tradition en proposant un design épuré basé sur des éléments graphiques forts mais raffinés, chaque figurine incarnant un grand principe de vie (sagesse, amitié, générosité …)
Plus récemment, le célèbre développeur de jeux vidéo, Shigeru Miyamoto a expliqué que les kokeshi lui ont inspiré la création des Mii, les personnages de la console de jeu Wii qui eux aussi ont aspect merveilleux et rituel.
Yoko Tawada, Narrateur sans âmes, – Là où commence l’Europe” J F Sabouret : Japon , la fabrique des futurs CNRS Blog : “les poupées Kokeshis” et Kokeshis Kimmidolls Les personnages Mii de Shigeru Miyamoto