Sho Asakawa, est une artiste japonaise adepte de l’encre que j’ai croisé sur le net par hasard. Le net favorise ces découvertes, de photos en liens, d’événements en définitions, la sérendipité est partout et nous ouvre les mondes. Curieux, qui désirons en savoir plus, découvrir et jeter une multitude de regards, apprendre, affiner, aiguiser, sautons comme à saute-mouton, découvrir ce monde rêvé qu’enfin je rêve. Car je l’avais cherché, et depuis longtemps.
D’abord une image, une encre subtile et massive, secrète, abstraite, imprégnée de nature et dans ce geste cette texture qui sont la peinture, déroulent dans ce même instant une exactitude de la conscience. J’y entends la respiration, le souffle, l’air, l’attention portée à ce qui vibre, à ce qui tremble. L’encre et la fine musicalité des tons, naturelle incision, déclinaison, comme une pente de roc s’oriente vers l’océan et plonge, comme une épine de pin ou un arbre oscille dans le vent. C’est cette capacité à exprimer cela, à affirmer la présence par le souffle, sans métaphore, sans rugosité, par participation, perspiration qui a maintenu vivante ma fascination. La rencontre avec l’occident fut fructueuse, qui autorisa le hors piste, la prise de risque et de dévaler dans cet l’esprit asiatique qui cachait dans des marques le paysage, ce grand contentement. Ce ne sont plus des couleurs, des tons, l’espace mais respiration et tremblement.
Mais qui est cette peintre ? Une page d’un site la présente ainsi :
Sho ASAKAWA, née au Japon, vit et travaille en France depuis 1987. L’artiste, le plus souvent, peint ou dessine dans la Nature non pas tant pour y trouver du paysage que pour entrer en communication avec Elle et ses vibrations, la lumière, le vent, l’espace infini… Pudiquement, l’artiste parle de “sensation sacrée” ou de “béatitude”… Probablement ce qu’elle n’ose dire c’est la “jouissance” de ce rapport intime, “rimbaldien” pourrait-on dire… Souvenons nous : “Picoté par les blés, fouler l’herbe menue, Par la Nature, – heureux comme avec une femme”.
Je cherche au Japon à confirmer et approfondir cette intuition, cette sensibilité qui est multiforme, toujours ailleurs que recherché, ces montagnes embrumées sans maisons me font être en communion avec le pressentiment lointain, venant loin depuis l’enfance, venant d’une sensibilité à la grande nature, comme une langue en dehors de toute forme, respire,
Sens de l’abstraction, qui pousse loin cette reconnaissance. Il ne suffit pas de toucher, il faut ingérer. Il semble que les artistes contemporains japonais manient l’encre pour en arriver là, cet éternel présent serein, hors de tout temps dans toute chose. L’encre, mon médium préféré, tellement lié à cette culture de l’écriture, l’encre-matière vit , l’encre-eau pulse, dévale les ciels et les montagnes. Les poèmes, les suggèrent. Voila ce que cette peinture vient confirmer, à la suite de traditions qui ancrent cet esprit, à la suite d’une passion contemporaine, on pousse le présent aussi loin que possible et bien sûr, poursuivant une pratique qui place l’artiste au cœur des éléments, eau et suie, poils de cheval, papier de riz , le sentiment accueille ceci et se met à dialoguer de plein pied avec la matière du monde.
Elle dit elle même , ce que j’avais tenté à plusieurs moments de ma vie de peintre, aller s’immerger dans la nature, non pour en retirer des lignes d’un paysage, non pour en retirer l’essence , faut il viser si haut, mais jouir de la respiration et vibration qui constituent la nature, nous contient, dialogue qui peut s’ensuivre entre soi oublié et l’écorce, la mousse ou le vent. La matière parle, le souffle vit, le poils du pinceau frémit. L’encre s’épanche aussi rigoureuse qu’indéfinie. Elle parle de sublimation, de rapport sacré, l’artiste dans la plénitude, l’anecdote évacuée, toute à l’encre.
Je me souviens de ma fascination pour la série des fleurs de Zoran Music. Une fascination que je sentais très proche de la nature profonde des fleurs et du végétal et que je retrouve ici. Peut être pas dans ces grands aplats d’encre de matière mais dans ces dessins plus intimes où la plante est laissée à ces méandres et souffles épurés de la ligne, de la masse, du rhizome, de la boucle et du bouton. On écoute la fleur qui est musique, comme le dit donne à l’entendre Aya Nishina dans ses pièce de musique abstraites. Le papier prend toute sa matérialité et dit nous sommes dans la matière mais mieux nous sommes dans l’esprit, dans la musique, dans la poésie. Mais nous sommes dans la respiration et dans ce qu’ici nous nommons improprement la nature. Il doit y avoir un meilleur mot, la respiration. Le peintre, lui même matière, lui même respiration. Le végétal à peine esquissé on est plongé dans le mystère et son frémissement. La délectation
Oui, c’est ici une pratique majestueuse, pour grande partie libérée de la figuration..;
au point qu’on dirait que c’est l’encre qui dirige, et “soumet”, son utilisateur à sa volonté.
Oui magnifique , c’est vers là que je retournerai si je me remettais à peindre , l’encre , elle le fait magnifiquement